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Chéri(e), éteins la télé ! On va au salon du livre !

« Nan, mais t’es dingue ? Tu me vois au salon du livre ? Tu veux me gâcher le week-end ? »

Rassurez-vous ! Un salon du livre, c’est sans doute bien moins ennuyeux que votre chéri(e) semble le penser. Et vous n’êtes pas forcé d’y rester des heures. J’ai découvert de type de manifestations il y a quelques années, et vous livre ici certaines de mes expériences, ainsi que quelques conseils pour profiter de la visite.

Un salon du livre ? Pourquoi ?

Parce que dans ces évènements, vous avez bien sûr la possibilité d’acheter des livres, mais aussi de rencontrer les auteurs. Une occasion unique de discuter de leurs œuvres et découvrir leur univers. La plupart des écrivains sont avides de rencontrer les lecteurs, répondent aux questions et dédicacent vos achats dans la bonne humeur.

Il existe des salons généralistes (tous genres littéraires), ou à thème (les livres jeunesse, la BD ou le polar par exemple). Il n’est pas rare que des animations soient organisées en parallèle : conférences, lectures, ateliers d’écriture, concours de nouvelles, démonstrations en live faites par des illustrateurs, caricaturistes, graphistes, calligraphes, etc.

J’ai ainsi vécu une curieuse expérience au salon du livre de Somain (59) en 2015. Je savais que l’évènement était très porté sur le fantastique mais n’imaginais pas me retrouver au milieu d’une assemblée d’elfes, lutins et autres gobelins. Les habitués du salon avaient enfilé leurs déguisements les plus étranges pour l’occasion… Croyez-moi, ce genre de surprise fait le bonheur des enfants !

Un salon du livre ? Où et quand ?

Difficile, voire impossible de trouver une liste exhaustive des salons sur le web. Certains sont très locaux et les organisateurs variés (communes, offices du tourisme, médiathèques, unions des commerçants, grandes surfaces culturelles, etc.) Vous pouvez consulter le site http://www.agenda-des-salons.com/ qui est assez complet et facile à utiliser. N’hésitez pas à partager dans les commentaires si vous avez d’autres sources. Sinon, « Mister Google » vous révèlera toutes les possibilités en lui indiquant simplement « salon du livre », suivi de votre région.

Il n’est pas rare que l’évènement soit organisé dans un cadre agréable voire un site de prestige. Profitez-en pour visiter l’endroit ! Ma dernière découverte est le salon du livre organisé chaque année au couvent royal de St Maximin-la Sainte Baume (rien que le nom fait entendre le chant des cigales à la ch’ti que je suis !). Le lieu est tout en voûtes et arcs de pierre. Il est adossé à une basilique majestueuse et se trouve non loin de rues piétonnes, de boutiques et de brasseries. De bons ingrédients pour un dimanche réussi !

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Un salon du livre ? Comment ?

Si vous êtes comme moi, un ou une fanatique de lecture, vous aurez envie d’optimiser votre visite. Quelques conseils :

  • 15 minutes de préparation…

… peuvent vous éviter quelques déconvenues. Les salons ont généralement leur site web ou leur page Facebook. Consultez la liste des auteurs présents et vérifiez leur présence le jour où vous y serez vous-même (si le salon se déroule sur un week-end, certains écrivains seront présents les deux jours, d’autres seulement le samedi ou le dimanche).

Repérez à l’avance ceux que vous aimeriez rencontrer. Ne vous faites pas d’illusions, vous ne verrez sans doute pas les vedettes du moment dans les petits salons locaux. Pour approcher les stars, pas de moyen plus sûr que de se rendre au célèbre salon du livre de Paris. Mais nous parlons là d’un autre monde, et c’est une histoire que je vous raconterai sans doute l’année prochaine, après l’édition 2017.

Dans les salons qui nous intéressent aujourd’hui, vous discuterez avec des auteurs qui vous ressemblent, des passionnés, des personnes qui prennent sur leur temps libre pour écrire et faire la promotion de leurs livres, qui ont des expériences, des rêves ou des souvenirs à partager. Pouvez-vous seulement imaginer le nombre de personnes qui ont écrit ou envisagent d’écrire un roman ? (votre voisin peut-être ? Vous seriez surpris.) Bien sûr tous ne le font pas avec la même réussite. Certaines œuvres ou personnalités vous plairont plus que d’autres. C’est tout l’intérêt de la visite !

Pour ce qui est des auteurs à succès, vous aurez quand même la chance d’en rencontrer quelques-uns si les organisateurs ont bien travaillé. Il faudra parfois être patient et attendre votre tour. J’ai ainsi croisé Franck Thilliez (salon du polar de Templemars 2015) ou bien Patrick de Carolis (salon du livre de Bondues 2016), et d’autres invités plus surprenants comme Véronique Genest (Neuville en Ferrain 2014) ou « un ancien de mon ancien lycée » (en tant qu’auteur cette fois. Qu’est-ce que je vous disais ?)

Il y a quelques semaines, pour ma deuxième visite au salon du polar de Templemars, j’ai eu la surprise de croiser Stéphane Bourgoin. Son nom ne vous dit rien ? Je ne le connaissais pas non plus. Pourtant, l’un de ses livres au titre évoquant Jack l’Eventreur a attiré mon regard. L’auteur est un spécialiste des tueurs en série. Pas de ceux que l’on croise dans les séries télévisées. Non. Ceux qu’il a lui-même rencontrés lors de ses recherches. Plus de soixante-dix. L’homme a des contacts au FBI et dans les Polices de plusieurs pays. Un parcours impressionnant pour cet autodidacte dont la famille fut autrefois meurtrie par l’un de ces monstres qu’il a passé sa vie à tenter de comprendre. Que l’on aime ou pas les histoires de profilage, voilà une rencontre inédite et qui ne laisse pas indifférent !

  • Souriez !

Pas toujours facile lorsqu’on n’est pas connu, de rester assis pendant des heures et tenter d’attirer le regard des visiteurs. Nombre d’écrivains sont plus timides que vous ! Souriez, remerciez, ça ne mange pas de pain et vous ferez des heureux. Si vous lisez les chroniques des auteurs à propos des salons, certains rapportent des moments d’anthologie : ainsi, le visiteur qui ne s’approche que pour demander les toilettes ou bien celui qui pose un million de questions pour finalement reposer le livre d’un air dégoûté. N’oublions jamais que nous sommes entre êtres humains civilisés.

Il y a aussi des auteurs très bavards. Ah ! C’est parfois compliqué. Ils parlent, ils parlent, décrivent leur livre avec passion, cherchent l’intérêt dans votre regard. Ils ont l’air tellement sympa. Mais bon, vous ne pouvez pas acheter un livre à chaque stand. Personnellement, je prépare toujours une petite phrase d’esquive : « je fais le tour des tables, ensuite je fais mon choix », « j’ai un budget limité aujourd’hui, mais je conserve précieusement votre flyer », ou encore « je peux vous retrouver sur Internet ? »

Quelques rares exceptions ne seront pas aimables. Bah ! Vous ne lirez pas leur livre de toute façon.

  • Et le budget dans tout ça ?

L’entrée est gratuite dans la majorité des cas (à l’inverse de Paris). Mais bien sûr, les livres ne le sont pas. Il faut bien que les auteurs vivent et soient rémunérés du travail faramineux que représente l’écriture d’un livre. Si vous avez l’intention d’acheter, je vous conseille de vous fixer une somme à ne pas dépasser (ne faites pas comme moi !) On se laisse rapidement tenter. Prudence, donc.

Prévoyez de l’argent liquide, tous les salons n’offrant pas la possibilité de régler en carte bleue. Dans certains cas, vous pourrez payer à une caisse centrale ou auprès de l’éditeur concerné s’il accompagne ses auteurs. Certains écrivains sont auto-édités et encaissent directement.

N’oubliez pas d’amener votre cabas !

  • Et ensuite ?

Ensuite ? Rentrez chez vous et ne rallumez pas la télé. Vous avez de la lecture. Vous avez fait de belles rencontres. Certaines se renouvelleront l’année suivante ou se prolongeront par des échanges d’e-mails. Car les écrivains aiment avoir l’avis (constructif) de leurs lecteurs. Beaucoup vous laisseront le moyen de les contacter et vous encourageront à leur écrire.

Alors, chéri(e), convaincu(e) ?

Vous promenez-vous souvent dans ce type de salons ? Avez-vous quelques anecdotes à partager ? Si vous en fréquentez plusieurs, quel est votre salon préféré ? Comme toujours, je suis curieuse…

Un Marin chilien – Agnès Mathieu-Daudé

Un Marin chilien – Agnès Mathieu-Daudé

Que diriez-vous de découvrir le Chili ? Ҫa vous tente ?
Dans ce cas, il vous faudra trouver un autre livre. Même si Un Marin chilien fait quelques flashbacks rapides dans ce pays, la totalité de l’intrigue se déroule en Islande. Pour tout dire, il y est d’ailleurs peu question de marins…

Une histoire et des personnages savoureux

Alberto est chilien, certes, mais il débarque en Islande pour étudier l’activité d’un volcan (non, il ne s’agit pas du plus célèbre) censé entrer prochainement en éruption. C’est en fait sa propre vie qui subira un séisme peu commun. Notre héros n’aura d’autre option que de s’interroger sur son parcours, remettre en question ses peurs et ses choix passés, affronter un sentiment de culpabilité qui ne cesse de le hanter.

Les Islandais forment un peuple rugueux, aux habitudes parfois étranges. Ne s’intègre pas qui veut. C’est ce que notre géologue va découvrir à ses dépens, en quelques jours cataclysmiques.

Pas un seul personnage dans ce roman qui soit fade ou sans intérêt ! Vous y croiserez une galerie d’individus authentiques et déconcertants. Prenez garde aux géants blonds des terres du nord, aux pulpeuses Walkyries et aux sorcières manipulatrices ! Il est si facile de se laisser envoûter (embobiner ? escroquer ?) en une seule nuit de naïf abandon.

Un style que l’on remarque

L’histoire est emprunte d’humour, de dialogues et de situations pittoresques. C’est sa grande force.

«- Je te dis que Thórunn a rencontré quelqu’un et tu me demandes comment elle va ? Tu te fous de moi ? Tu veux que je te réponde quoi ? Qu’elle va bien parce qu’elle se fait sauter ?

Óskar soupira un grand coup. Il allait falloir faire face.

  • C’est qui ? 
  • Un Chilien. »

L’auteur change régulièrement de point de vue ce qui alimente les malentendus et entretient le suspense. Comment ce malheureux géologue va-t-il donc se sortir des mauvais pas qu’il ne cesse d’accumuler sans même s’en rendre compte ?

Le style est travaillé sans en faire trop. Pas de clichés, mais des images parlantes et originales. Personnellement, je trouve certaines phrases particulièrement savoureuses :

« (…) la plupart ne faisaient qu’aller avachir leur désœuvrement un peu plus loin sur la jetée, assis jusqu’à l’heure de rentrer chez eux comme si l’océan allait venir déposer à leurs pieds un boulot ou Vénus dans une coquille. »

« Alberto le suivit en essayant de ne pas se prendre les pieds dans les chiens qui lui sautaient dessus, visiblement avides de manifester l’affection soudaine et injustifiée qui traversait leur corps poilu lorsqu’un inconnu venait à discuter avec leur maître. »

Un dépaysement

Un Marin chilien donne également l’occasion de découvrir l’Islande, son histoire, sa géographie, ses coutumes. A n’en pas douter, l’auteur s’est sérieusement documenté sur le pays. Saviez-vous qu’il y a plus de deux siècles un volcan islandais avait déjà plongé l’Europe dans le chaos, avec des conséquences bien plus dramatiques que de simples retards dans les transports ?

Saviez-vous que le requin du Groenland est dépourvu de canal urinaire et évacue ses déchets par transpiration ? Sa chair fraîche est toxique. Les Islandais en ont fait le Hákarl, spécialité culinaire locale et expérience gustative sans doute incomparable…

Au cours de la lecture, si votre tablette traîne à portée de main, n’hésitez pas à taper quelques mots clés islandais dans un moteur de recherche. L’idée de partir en randonnée à la découverte de l’île mystérieuse pourrait bien venir vous effleurer.

Ce livre est pour vous si :

  • Vous aimez l’humour subtil ;
  • Vous voulez découvrir l’Islande et son peuple curieux / attachant / inquiétant, dont la notoriété ne cesse d’augmenter depuis le dernier Euro de football !
  • Vous aimez les enchaînements de quiproquos et de situations insolites.

Difficulté de lecture : **

Quelques mots sur Agnès Mathieu-Daudé : après des études d’histoire, l’auteur est devenu conservateur du patrimoine. Pour notre plus grand plaisir, elle est aussi écrivain de talent, comme le prouve Un Marin chilien et les prix littéraires obtenus en 2016 :

  • Coup de cœur de la 25e Heure du Mans 2016
  • Prix littéraire des Grandes Écoles 2016
  • Prix Révélation de la Société des Gens de Lettre 2016

Envie de rester en Islande ? Je vous propose : https://www.unepiledelivres.com/a-la-grace-des-hommes-hannah-kent/

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Un Marin chilien
Paru aux éditions Gallimard, 2016
ISBN : 978-2-07-011949-3
256 pages
Littérature française