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Mon maître et mon vainqueur, de François-Henri Désérable, raconte l’histoire sans doute la plus racontée de l’histoire de l’humanité. La plus banale aussi. Une folle passion dans le cadre d’un triangle amoureux. Un adultère, la jalousie, des envies de meurtre. Une simple anecdote sans doute pour nombre de juges confrontés à l’éternel manège. Et c’est devant un juge, d’ailleurs, que tout se passe. Le meilleur ami de Vasco est convoqué pour apporter son aide à l’enquête.
Quelle enquête ? ça, on ne l’apprend pas immédiatement. Mais elle commence par une histoire banale…

Un roman jubilatoire

Le narrateur doit donc aider le juge à décrypter le cahier de poésies de Vasco, sur lequel il s’est épanché à propos de son amour pour Tina. Tina qui a épousé Edgar, à qui elle a donné deux enfants.

On avance ainsi, de poème en haïku, pour découvrir le déroulement des faits et mieux comprendre les motivations du poète en herbe.

Le narrateur en profite pour nous livrer ses impressions, celles qu’il confie au juge, comme celles qu’il garde pour lui.
Nous voilà dans les méandres de ses pensées, ballotés au fil des digressions qui, toujours, finissent par nous amener quelque part.

Et c’est souvent très drôle ! Avez-vous déjà tenté de retracer le fil de vos pensées ? Avez-vous déjà essayé de les observer avec recul et détachement ? L’esprit humain, bien loin d’être linéaire, saute du coq à l’âne, se focalise parfois sur un détail insignifiant, se remémore une anecdote, apparemment sans aucun rapport, mais, en filigrane, poursuit inlassablement sa réflexion. Pour arriver quelque part.

Et c’est de cette manière que François-Henri Désérable nous raconte cette histoire banale. J’ai lu quelque part qu’il savait écrire des romans jubilatoires. C’est bien vrai !

Cahier de poésie
(Crédit photo : Adriano Gadini, Pixabay)

Un roman empreint de poésie

Le cahier de Vasco s’intitule « Mon Maître et mon vainqueur », quelques mots tirés d’un vers de Verlaine.
Le ton est donné.

Tout le monde est passionné de poésie dans ce roman : Tina est fan de Verlaine ; le narrateur connaît bien le genre ; Vasco est lui-même poète, il travaille à la BnF ; et le juge est amateur !

Et moi qui n’y connais rien ! Qui suis restée admirative de Baudelaire sans jamais poursuivre ni me frotter à d’autres auteurs ! Dont l’esprit résolument scientifique s’accommode mal des vers opaques au sens caché !
Eh bien, ce roman m’a poussée à entrer dans une librairie pour y feuilleter quelques pages de Rimbaud. Une rapide incursion dans le monde poétique. Y retournerai-je ? Allez savoir !

Mon maître et mon vainqueur est pour vous si :

  • Vous aimez la poésie ou avez envie de l’aimer,
  • La passion amoureuse vous a quelque fois emporté,
  • Vous avez envie d’une histoire banale. Ou originale ? Je ne sais plus.

François-Henri Désérable est un jeune auteur talentueux (né en 1987). Ancien joueur de hockey professionnel, il passe une partie de son enfance entre Amiens et les États-Unis. Il se lance dans l’écriture à 18 ans et, depuis, chacun de ses livres remporte un prix. « Mon maître et mon vainqueur » reçoit celui de l’Académie française, excusez du peu.

Je l’ai découvert grâce à son roman « Évariste », qui retrace la vie d’Évariste Galois, mort à 20 ans, en laissant derrière lui quelques pages vouées à révolutionner les mathématiques du XIXe siècle.

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Mon maître et mon vainqueur, François-Henri Désérable
ISBN : 978-2-07-290094-5
Éditions : Gallimard
Date de première publication : 2021
191 pages
Littérature française
Prix : grand prix du roman de l’Académie française 2021