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Au début des années 60, Naja quitte l’Algérie avec ses enfants pour rejoindre son mari Saïd, qui travaille en France depuis quelques années déjà. Rapidement, la famille s’installe dans une tour HLM nouvellement construite. La vie est difficile mais prometteuse. Dans Soleil amer, Lilia Hassaine retrace trois décennies d’immigration, d’intégration, de vies de femmes effrayées, courageuses, souvent déçues.

Difficile intégration

Le couple tente de trouver sa place, tiraillé entre un pays qui n’est pas vraiment le sien et le souvenir d’une région qui lui échappe et l’oublie.
Les voilà pris dans la faille spatio-temporelle de l’intégration (l’image est de l’auteure). Les voilà ballottés entre deux cultures, confrontés à leur propre racisme comme à celui d’en face.

Éternelle histoire d’immigration, passé douloureux d’une France loin d’être sans peurs et sans reproches.

Les enfants de Naja cherchent l’issue de ce gouffre dans lequel l’Histoire les a plongés. Certains s’y noieront, d’autres en sortiront. Seule certitude : le chemin est long. Se compte en générations plus qu’en années.

Les cités HLM

Dans les années 60, les femmes de la cité HLM se rassemblent en un petit groupe solidaire. Il y a là des Michèle, des Sylvie, autant que de Nora ou Naja. Ce sont des femmes, voilà tout, qui s’organisent pour faire face aux difficultés de la vie et du mariage, qui partagent leurs joies et leurs espoirs.

« Quitter un pays qu’elles aimaient, suivre un mari qui trimait, perdre leurs enfants un par un, si demander si elles avaient fait le bon choix, être mère c’était ça, accumuler les erreurs, apprendre sans cesse, échouer encore. Les héroïnes, c’était elles.»

Mais à mesure que se tarit la bonne volonté gouvernementale, les cités se délabrent. Le livre en décrit la lente dégradation. Il relate la disparition des espaces verts, les murs peu à peu recouverts de tags et la progression des drogues, attirées là par le désœuvrement de la jeunesse. Ceux qui le peuvent s’enfuient vers d’autres espaces et ne restent là, finalement, que « les immigrés ».

Soleil amer en banlieue parisienne

Soleil amer en banlieue parisienne
(crédit photo Steven Lasry, Unsplash)

Les jumeaux

Cette chronique serait bien incomplète si je n’évoquais les jumeaux que Naja met au monde peu après son arrivée en France. Par le jeu des traditions et des secrets familiaux, les deux garçons grandissent sans savoir qu’ils sont frères, chacun d’un côté de la barrière, mais néanmoins liés, comme si, pour eux, il ne pouvait y avoir de séparation définitive.

Deux pôles qui s’attirent sans vraiment pouvoir se rejoindre, qui se repoussent sans vraiment pouvoir se quitter. Un thème récurrent dans le roman, à l’échelle d’une famille comme d’un pays.

« L’Algérie et la France sont des sœurs empêchées. Elles n’ont pas réussi à vivre ensemble, mais n’ont jamais su vivre l’une sans l’autre.»

Soleil amer est pour vous si :

* Vous aimez les histoires touchantes,
* Les questions d’intégration vous intéressent,
* Vous êtes parfois impressionné par la résilience de certaines femmes.

Découvrez ici d’autres romans évoquant l’immigration et le guerre d’Algérie :
L’art de perdre, Alice Zeniter
L’Art français de la guerre, Alexis Jenni

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Soleil amer – Lilia Hassaine
Éditions Gallimard, 2021
ISBN : 978-2-07-295217-3
158 pages
Littérature française