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L’Inde et l’Écosse, peut-on trouver deux mondes plus différents ? Ils se marient pourtant dans ce roman, pour le meilleur et pour le pire, mais surtout pour le plaisir des lecteurs. Les princes de Sambalpur est un polar atypique, se déroulant dans l’Inde des années 20, pays alors sous domination britannique. Policier écrit par Abir Mukherjee, un auteur écossais élevé à Glasgow et fils d’immigrés indiens. Vous voyez le mélange ?

Hypocrisie et choc des cultures

En bons Français (ou francophones) que nous sommes, il peut être tentant (ou effrayant ?) d’oublier nos propres casseroles et de blâmer les Britanniques pour leur passé colonial et les crimes perpétrés en Inde pendant près de deux siècles.

La colonisation est un sujet complexe qu’il me semble bien difficile d’appréhender et sur lequel peu de protagonistes acceptent de reconnaître leurs torts.

Dans une interview accordée au Matin Dimanche (à retrouver dans la revue de presse proposée par la page officielle des éditions Liana Levi), Abir Mukherjee explique :

« Personne ne se regarde dans le miroir. C’est ce qui m’a poussé à écrire sur l’Inde durant cette période de la colonisation. »

Et les deux cultures d’en prendre pour leur grade. Qui mieux que cet auteur pour garder un maximum d’objectivité ? Il met en lumière l’immense hypocrisie régissant autrefois les relations entre les deux pays, hypocrisie volontaire ou non, mais se retrouvant aujourd’hui dans les discours des uns et des autres.

Le lecteur contemple ce choc de deux univers opposés, l’un strict et logique, l’autre aussi coloré que mystique.

« C’est l’Inde, capitaine. Voyez-la telle qu’elle est, pas telle que vos apologistes de l’Empire et vos professeurs d’orientalisme voudraient que vous la croyiez. Faute de quoi, vous ne nous comprendrez jamais. »

Inde

 

Un polar réjouissant

Mais ces questions sérieuses ne font pas tout le livre. Loin de là. C’est d’abord un polar, je l’ai dit, à l’originalité jubilatoire.

Jubilatoire car les personnages comme leurs interactions sont décrits avec beaucoup d’humour, à commencer par notre duo de détectives, l’un anglais, le capitaine Wyndham ; l’autre indien bien sûr, le sergent Barnerjee. Comme les deux facettes de la personnalité d’un auteur écossais aux origines indiennes.

« Je sais ce que c’est ! s’exclame-t-il, aussi rayonnant qu’un Français dans une cave à vins. »

Plutôt britannique, l’humour, pour le coup !

Jubilatoire également car l’histoire est bien menée. Qui donc est le meurtrier ? En réalité, chaque personnage croisé devient suspect, avec toutes les raisons du monde d’avoir assassiné l’héritier du maharajah.

« Sambalpur, avec ses complots et ses intrigues, semble être le genre d’endroit où une saine dose de paranoïa peut vous aider à survivre. »

Alors quoi ?

Est-ce une nouvelle version du célèbre roman d’Agatha Christie dans lequel tout le monde est coupable ? C’est sans compter la facette indienne d’Abir Mukherjee…

Difficulté de lecture : **

Les princes de Sambalpur est pour vous si :

  • Vous préférez les policiers sans hémoglobine (ou presque) ;
  • L’Inde vous fascine ;
  • Vous avez l’esprit ouvert.

Le petit plus : c’est une série ! Les princes de Sambalpur en est le deuxième titre. Si vous voulez prolonger le plaisir, procurez-vous L’attaque du Calcutta-Darjeeling, du même auteur, et guettez l’arrivée du troisième opus !

***

Les princes de Sambalpur – Abir Mukherjee
Éditions Liana Levi, 2020, pour la traduction française
ISBN : 979-10-349-0324-5
362 pages
Traduit de l’anglais par Fanchita Gonzalez Batlle
Littérature écossaise