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Puisque nos étés deviennent caniculaires, il me fallait trouver un moyen de me rafraîchir. Le grand marin m’y a aidée. Ce premier roman de Catherine Poulain nous emmène en Alaska, non loin du bout du monde, pour une aventure singulière. Lili, une femme frêle, un moineau d’apparence fragile, a tout quitté pour embarquer sur les bateaux et pêcher. Se fondre dans un univers rude, dangereux, sans concessions. Sans chaleur ?

Un roman d’atmosphère

Lors de la lecture, il me suffisait d’ouvrir le livre pour me retrouver propulsée sur les rivages nord-américains ou sur le pont d’un chalutier balloté par une mer indifférente au destin des hommes.

Catherine Poulain peint ses paysages à petites touches, à coups de phrases courtes et efficaces. Elle décrit le beau comme le pire. Le vol des oiseaux, la danse des vagues, l’odeur fétide des cales, les viscères de poissons collés sur le bois du bateau et les ordres gueulés par les hommes. C’est une poésie brute qui effraie et séduit à la fois.

À terre, les marins se transforment. Ils rôdent de bars en terrains vagues, traînant derrière eux leurs angoisses et leurs regrets. L’alcool, les joints, la dope. Les femmes, quand c’est possible. Mais ce qui frappe avant tout, c’est cette bienveillance latente, une solidarité tenace malgré les conditions et le respect accordé à ceux qui ne ménagent pas leur peine. Sur l’eau comme sur les quais, les marins sont sur le même bateau.

Le bout du monde

Dans cet écosystème sauvage, Lili, peu à peu, trouve sa place. Elle a laissé loin d’elle Manosque et sa Provence natale pour cette terre glacée. Elle est sale et vit sans confort. Son corps s’abîme, elle court au-devant du danger. Mais elle s’en fiche. Ce qu’elle veut, elle, c’est pêcher. C’est étrange, cette obsession, à la fin. Ça ressemble à une fuite. Ça prend parfois des allures de quête.

Que cherche-t-elle ? Être libre ? Elle semble vouloir se perdre. En témoigne sa volonté de finalement l’atteindre, le bout du monde. Ce Point Barrow où il n’y a plus rien que le vide.

« Les contours fixes de ce monde, nous les avons laissés à terre. »

Bah, c’est certain, elle finira noyée, gelée, disloquée entre les mailles d’un filet. Ou embrochée par l’un de ces poissons sans cervelle. Qui donc pourrait l’en empêcher ?

Le grand marin peut-être ?

Difficulté de lecture : **

Le grand marin est pour vous si :

  • Vous aimez l’authenticité ;
  • L’aventure sans retour vous fait rêver ;
  • Vous aimez les romans forts.

L’auteure : Catherine Poulain parle en connaissance de cause puisqu’elle a pêché pendant dix ans en Alaska. Le grand marin pourrait-il être un roman autobiographique ? L’écrivaine s’en défend. L’interview de Catherine Poulain dans la grande librairie vous en dira plus. Mais lisez le livre d’abord…

Vous voulez d’autres histoires de marins ? Voici trois livres qui parlent de mer et de voiliers.

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Le grand marin, Catherine Poulain
Éditions de l’Olivier, 2016
ISBN : 978-2-7578-6865-2
376 pages
Prix du roman Ouest-France-Étonnants Voyageurs /Prix de la ville d’Asnières / Prix Gens de Mer / Prix Joseph Kessel / Prix Compagnie des pêches / Prix Livre & Mer Henri-Queffélec / Prix Nicolas Bouvier / Prix Pierre-Mac Orlan